Culpabilité et Troubles Neurologiques Fonctionnels : quand la colocataire envahissante s’invite dans nos vies
- melaniemahe
- 8 sept.
- 4 min de lecture
I. Introduction : la coloc’ qu’on n’a pas choisie
La culpabilité… c’est un peu comme une colocataire envahissante. Elle s’installe sans prévenir, elle ne paye pas le loyer et elle adore commenter nos moindres faits et gestes :« Tu as encore laissé ton conjoint s’occuper de tout pendant que tu faisais une sieste ? Bravo… »
Chez les personnes atteintes de troubles neurologiques fonctionnels (TNF), cette coloc’ est particulièrement collante. Fatigue imprévisible, symptômes variables, crises dissociatives… Chaque imprévu devient une nouvelle occasion pour la culpabilité de frapper à la porte.
II. Étymologie et définition (pour briller en société)
Le mot culpabilité vient du latin culpa, qui signifie « faute, blâme ». Au départ, il suffisait de casser un vase pour qu’on vous colle la culpa.
Aujourd’hui, selon l’APA Dictionary of Psychology (2022), la culpabilité est :
« Une émotion ressentie lorsqu’une personne pense avoir transgressé une norme morale ou sociale, avec un sentiment de responsabilité personnelle. »
En clair : même si on n’a rien fait de mal, notre cerveau adore inventer des scénarios où « tout est de notre faute ».
III. Petit détour historique
Antiquité : la culpabilité rime avec péché et punition divine.
Moyen Âge : elle s’invite dans la justice religieuse.
XIXᵉ siècle (Freud) : le surmoi, cette petite voix intérieure juge sévère, entre en scène.
Aujourd’hui : la psychologie moderne la relie aux maladies chroniques et à la relation aidants–aidés.
IV. Culpabilité et maladies invalidantes : bingo corporel et moustiques nocturnes
Les chercheurs Tangney & Dearing (Shame and Guilt, 2002) expliquent que la culpabilité s’accentue lorsqu’on dépend des autres.
Résultat : on s’excuse d’exister, on se sent comme un poids, et on oublie que demander de l’aide est un droit, pas une faute.
Dans les TNF, cette culpabilité est exacerbée :
Les symptômes changent d’un jour à l’autre (un vrai bingo corporel ).
On peut passer de « je fais une balade » à « je suis cloué au lit » en quelques heures.
Les proches doivent improviser, et nous… on culpabilise de « gâcher la fête ».
Pour les crises fonctionnelles dissociatives, c’est encore plus lourd : dépendance quasi totale aux aidants, impossibilité de se gérer seul. Comme l’écrivent Stone et Carson (Functional Neurological Disorder: A Primer, Cambridge University Press, 2020) :
« L’incapacité à anticiper ou contrôler les crises dissociatives renforce la dépendance aux proches et, par conséquent, le sentiment de culpabilité. »
V. Témoignage (parce que ça parle mieux que la théorie)
« Un samedi, j’avais promis à mes enfants de les emmener au cinéma. Le matin, tout allait bien. L’après-midi ? Crise fonctionnelle. Impossible de sortir du lit. Mon conjoint a dû gérer seul, les enfants étaient déçus, et moi… j’avais l’impression d’être la pire maman du monde. Pourtant, je n’y étais pour rien ! »
Beaucoup se reconnaîtront dans ce genre de situation. La colocataire « culpabilité » adore débarquer pile au mauvais moment.
VI. Citations sérieuses (pour montrer qu’on ne dit pas que des bêtises)
« La culpabilité est une émotion morale essentielle, mais dans les contextes de maladie chronique, elle devient un facteur de souffrance supplémentaire. » (Müller & Schmitz, Journal of Health Psychology, 2017, 22(8), 1047–1058).
« Les troubles neurologiques fonctionnels illustrent la manière dont la variabilité des symptômes interfère avec la vie sociale et familiale, renforçant le vécu de culpabilité.» (Stone, J., Carson, A., 2020. Functional Neurological Disorder: A Primer. Cambridge University Press).
« Les aidants familiaux ressentent souvent la double peine : la fatigue du soin et le poids de la culpabilité partagée avec le malade. » (Caregiving Review, 2020, 12(3), 40–49).
VII. Quelles pistes pour apprivoiser la culpabilité ?
Bonne nouvelle : on ne peut peut-être pas virer la coloc’ « culpabilité », mais on peut l’apprivoiser !
Comprendre et nommer
Accepter que c’est un sentiment normal.
En parler avec un psychologue, un médecin ou dans un groupe de patients.
Thérapies
TCC (thérapies cognitivo-comportementales) : repérer les pensées « je suis un poids » et les remplacer.
ACT (thérapie d’acceptation et d’engagement) : apprendre à vivre avec la maladie tout en restant aligné avec ses valeurs.
Groupes de parole : pour partager et alléger le poids.
Stratégies quotidiennes
Dire « merci » au lieu de « pardon » quand on demande de l’aide.
Fixer de petits objectifs réalistes.
Se rappeler que l’aide des proches est un choix d’amour, pas une contrainte.
Approches spécialisées
Soutien psychologique ou psychiatrique en cas d’anxiété/dépression.
Programmes pluridisciplinaires dans les centres spécialisés TNF.
Méditation pleine conscience validée scientifiquement pour réduire la rumination.
Ressources
Associations comme CAP TNF pour rompre l’isolement.
Écriture et témoignages : partager son vécu pour dédramatiser.
Humour et auto-dérision : arme secrète pour alléger la charge.
VIII. Pour aller plus loin : nos autres articles
IX. Conclusion : dompter la bête moustique
La culpabilité, c’est comme un moustique dans la chambre : on n’arrive pas à l’ignorer, mais on peut éviter qu’il nous empêche de dormir toute la nuit.Dans les TNF, elle est lourde, mais pas insurmontable. Avec du soutien, du dialogue, de la thérapie et parfois une dose d’humour, elle peut même devenir un moteur de lien avec nos proches.
👉 Et vous, comment vivez-vous votre culpabilité vis-à-vis de vos proches, vos enfants, vos collègues ?
Partagez vos expériences : vos mots peuvent aider d’autres à se sentir moins seuls.

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